lundi 19 septembre 2011

Algues marines et aquaculture : la norme commune européenne bio



Entré en vigueur en juillet 2010 le règlement CE 710/2009 (*) portant sur la production biologique d’animaux d’aquaculture (poissons, mollusques et crustacés) et d’algues marines vise à permettre au consommateur européen d’identifier de façon plus précise les produits issus de l’aquaculture satisfaisant à la norme européenne de production biologique. L’objectif est de garantir une production de haute qualité en limitant l’incidence sur le milieu marin.

Jusqu’à la mise en œuvre de ce nouveau règlement européen, la certification pratiquée par les Etats membres de l'Union européenne se référait à des standards privés ou un cahier des charges national. Désormais ce texte impose une série de critères minimaux communs à l’ensemble des Etats de l’Union européenne.

Cette mesure est d’autant plus importante que jusqu’alors seuls deux pays – le Danemark (2004) et la France (2007) – disposaient d’une législation nationale sur l’aquaculture biologique. L’Irlande qui élaborait un cadre juridique en 2007, l’avait mis en sommeil dans l’attente de ce texte européen. Par ailleurs dans l’ensemble de l’Union, la majorité des opérateurs sont privés mais, seuls quelques-uns sont présents dans plus d’un Etat. Cette situation hétérogène rendait par conséquent les procédures complexes, la traçabilité plus difficile, et les exportations plus coûteuse.

En effet, l’absence de systèmes de labellisation transfrontaliers en Europe conduisait les opérateurs à supporter des coûts de re-certification des produits qu’ils souhaitaient commercialiser dans des pays tiers. Désormais un seul règlement s’applique avec une commercialisation sous un logo bio commun qui encourage les producteurs en valorisant les bonnes pratiques environnementales.

« Les nouvelles normes de productions entendent assurer un réel bien-être aux poissons. Les densités établies par le texte européen sont en ligne avec celles généralement pratiquées par les certifications bio existantes, et nettement plus strictes que la productions dite conventionnelle » (**).

L’innovation essentielle porte aussi sur le fait que les algues marines sont incluses dans le périmètre du règlement. « Aucun texte jusque-là ne permettait aux algues d’être labellisées bio », Jean-François Arbona de C-Weed Aquaculture indiquant par ailleurs que s’agissant des zones de récoltes « la transposition du règlement a contribué à le rendre encore plus stricte si bien qu’à l’heure actuelle seuls 20 % des côtes bretonnes sont éligibles » (***) .

Les points de blocage sont essentiellement liés au classement des eaux côtières conformément à l'application de la DCE (Directive Européenne 2000/60 dite "Directive Cadre sur l'Eau") et conformément au zonage conchylicole. S’il ne s'agit pas de classer l'ensemble du littoral breton en zone éligible Bio, il convient d’établir un protocole d’accord et de suivi rigoureux des masses d'eau éligibles Bio en lien avec les différents organismes concernés par la transposition en droit français de la DCE (les Agences de l'Eau, Ifremer, le Ceva, les DDTM...).

Le règlement n’impose pas un changement brutal aux exploitations aquacoles en bio existantes, puisque des délais d’adaptation sont prévues jusqu’en 2013 pour satisfaire à l’ensemble des critères. En revanche l’ensemble de ces mêmes critères contenus dans le cahier des charges européen s’imposent à toute nouvelle implantation de ferme d’élevage en bio.


Quelques repères pour mieux connaître les algues :



Sur les 16 millions de tonnes d’algues produites chaque année dans le monde, près de 80% sont utilisées en alimentation humaine, représentant une valeur économique d’environ 8 Md $.

L’Europe utilise les algues depuis des siècles dans des applications industrielles ; leur utilisation pour l’alimentation humaine et la nutrition santé est un secteur en croissance. En Bretagne notamment, les algues alimentaires représentent un potentiel important, en phase avec les axes de développements stratégiques de la région.

L’intérêt croissant des consommateurs est suscité par les nombreuses qualités nutritionnelles de ces algues dont les compositions sont très différentes des végétaux terrestres. Afin d’assurer la sécurité alimentaire, une réglementation a été mise en place. Elle comporte une liste d’espèces et de groupes autorisés à la consommation humaine et des recommandations sur les limites acceptables de certains contaminants : métaux et constituants : iode.



- La filière algue française réalise un chiffre d’affaire d’environ 150 millions d’euros, elle emploie 1000 personnes dont 240 récoltants professionnels.


- La France est aussi le deuxième producteur mondial de carraghénanes (E 407), le cinquième producteur mondial d’alginate (E 400, 401, 403, 402, 404, 405) et le huitième producteur d’agar 
(E 406) avec 60 000 tonnes d’algues fraîches déchargées.


- Lanildut est le premier port goémonier européen de déchargement des algues en France, avec 30 000 tonnes annuels de laminaires sur les 45 000 tonnes débarquées en Bretagne.

Relire également l'article du blog du 03/07/2010 sur la radiographie du champs d'algue de Molène.

Pour aller plus loin sur la biodiversité du littoral :

- Retrouvez notamment les archives des entretiens Science et Ethique 2006 : "La biodiversité du littoral"

Rappel : Le dialogue et le partage des connaissances indispensables pour préserver et exploiter durablement les ressources nécessitent des décisions politiques locales, européennes et internationales qui soient mieux comprises.
Les 10e entretiens Science et Ethique, avaient « repéré » des recherches, des techniques, des expériences françaises, européennes et mondiales, qui modifient notre perception de la biodiversité.
Comment vivons-nous ces moments de transformation qui doivent permettre aux futures générations de poursuivre l’exploitation des ressources du littoral ?




Sur vos agendas :

Les entretiens Science et Ethique 2011 qui fêteront cette année les 15 ans d’existence lors des deux journées de débat des 17 et 18 novembre 2011 à Océanopolis Brest auront pour thème : "Quelle économie pour quelle croissance ? Economie bleue, plans climat-énergie territoriaux, aménagement du territoire et énergie de la mer".



(*) le règlement n°710/2009 du 5 août 2009 de la commission européenne modifie lui-même le règlement (CE) n°889/2008 portant application du règlement (CE) n°834/2007 du Conseil européen en ce qui concerne la production biologique d’animaux d’aquaculture et d’algues marines. (**) par exemple la densité en saumons d’un exploitation aquacole bio ne peut excéder 10 kg/m3 en eau de mer alors qu’elle peut atteindre 70 kg/m3 en production conventionnelle. (***) En janvier 2011, seuls deux récoltants et un algoculteur bretons sont certifiés Bio, ainsi qu'une petite zone de récolte en Aquitaine.

Article RH 3B Conseils
Source : UE / Ifremer / Interbio